EDITORIAL
Marie-Agnès Fremont
ORIENT,
OCCIDENT
Nous avons choisi ce thème car nous avons été interpellés par une parole du Maître Djwhal Khul affirmant que la fusion des manières différentes dont l’Orient et l’Occident approchent la Sagesse fait partie du plan évolutif pour l’humanité. Comment contribuer à l’évolution qui cherche à se manifester ?
Des liens puissants unissent depuis l’Antiquité Orient et Occident. À l’origine, ces liens étaient principalement économiques. Au moyen âge, la Chine et l’Inde ont fourni au monde : thé, épices, soie, joaillerie, pierres précieuses, porcelaine, textiles. L’Asie a été le siège d’un essor des sciences et des techniques qui a souvent précédé celui de l’Occident et lui a même légué des découvertes essentielles. En mathématiques, les « chiffres arabes » que nous utilisons aujourd’hui en Occident ont en fait été importés d’Inde par les savants arabes. Les savants chinois ont rassemblé des connaissances pointues : en astronomie (4 siècles avant notre ère), industrie (pompes hydrauliques, machines à vapeur), médecine (acupuncture, pharmacologie), horlogerie (la boussole). La Chine et l’Inde ont dominé l’économie mondiale pendant plus d’un millénaire jusqu’au XVIIIe siècle, mais c’est l’Occident qui a connu la révolution industrielle et le développement de l’économie capitaliste !
Deux siècles plus tard, l’Asie regagne la première place sur l’échiquier mondial. En Occident, c’est la crise, les entreprises délocalisent leur industrie en Orient pour profiter de sa main-d’oeuvre bon marché. La récente pandémie a mis en évidence l’interdépendance économique Est-Ouest et notamment la dépendance des pays occidentaux vis-à-vis de la Chine pour la production des semi-conducteurs présents dans le matériel informatique. La guerre en Ukraine active la prise de conscience de cette interdépendance en même temps qu’elle tend à diviser le monde en deux blocs, division qui réveille de vieilles oppositions politiques, économiques et idéologiques. Quel regard spirituel pouvons-nous porter sur ces flux et reflux des courants d’énergie entre Orient et Occident ? Penser l’union spirituelle entre Orient et Occident s’accompagne nécessairement d’un établissement de justes relations.
Au XXIe siècle, la sagesse orientale désigne surtout les spiritualités nées en Asie : hindouisme, bouddhisme, confucianisme, taoïsme, shin- la philosophie chinoise du Yi-King. La culture védique, le shintoïsme japonais et le Yi-King chinois prennent corps dans la très haute Antiquité, il y a plus de trois mille ans, avec une transmission orale. Puis vers le V » siècle avant notre ère apparaissent à peu près simultanément le bouddhisme, le taoïsme, le confucianisme, issus de la parole du Bouddha, de Lao-Tseu, de Confucius. Avec le début de notre ère, Jésus Christ se manifeste dans ce qui est aujourd’hui le Moyen-Orient et son enseignement se répand en direction de l’Occident.
La rencontre religieuse et philosophique entre Occident et Orient a lieu dès le xviiie siècle avec notamment l’influence des missionnaires jésuites qui importent la pensée occidentale en Asie. Mais c’est surtout au début du xxe siècle que nombre d’intellectuels chinois et indiens viennent étudier en Occident. Des approches de synthèse entre la pensée orientale et la pensée occidentale voient le jour, ainsi, celle de Sri Aurobindo (1872-1950) et celle de Krisnamurti (1895-1986), tous deux indiens et instruits dans les universités anglaises. Puis à partir des années 1970, la jeune génération occidentale contestataire cherche une réponse aux affres de la vie matérialiste et individualiste. Elle rejoint l’Inde pour y découvrir ashrams, yoga, méditation ou s’initier au bouddhisme. Une mosaïque de pratiques originaires d’Asie (arts martiaux, ayurvéda, fengshui) se diffuse en Europe.
Orient et Occident abordent les problèmes sous un angle différent, et pourtant, ni l’un ni l’autre ne peut prétendre avoir atteint la sagesse absolue. La Sagesse Immémoriale est partout la même. Les méthodes diffèrent mais le but est le même et les résultats sont identiques. Pour l’évolution de l’humanité, Orient et Occident ont besoin l’un de l’autre. C’est le Rayon 4 d’harmonie par le conflit qui les relie. Il est le rayon de la personnalité de l’Occident et le rayon de l’âme de l’Orient. Il est aussi le rayon de l’âme de l’humanité. Il apporte l’énergie pour parvenir à l’harmonie en détruisant les limitations qui empêchent l’unité. Le système oriental admet qu’en toute forme humaine existe une conscience spirituelle dont le corps physique est le moyen d’expression. Le système occidental ignore le subjectif et aborde l’esprit humain en termes de fonctions cérébrales. Leur approche de l’éducation a été fort différente ; la vieille Asie a donné un enseignement poussé à ceux qui marquaient des aptitudes pour la culture spirituelle. Elle a produit la venue de Sauveurs dont les paroles et les écrits ont imprégné les pensées des hommes : Bouddha, Zoroastre, Krishna, le Christ, Mahomet et d’autres.
r contre, l’éducation des masses a été négligée. En Occident, au contraire, nous avons l’éducation collective, accessible à tous, qui a produit un niveau assez élevé de connaissance intellectuelle et permis la recherche scientifique. D’un côté la sagesse, la méditation, le vécu des états de conscience, de l’autre, la raison, la science, l’expérimentation, les preuves scientifiques. D’un côté le mental abstrait, la pensée synthétique et intuitive, de l’autre l’intellect, la pensée analytique et rationnelle. L’enseignement ésotérique occidental a pour fonction d’adapter l’enseignement spirituel oriental à l’esprit occidental afin de promouvoir l’unité entre les deux pensées. Le Maître Djwhal Khul avance que cet enseignement sauvera la civilisation occidentale. Citons les enseignements de l’Agni Yoga transmis à Helena Roerich par le Maître Morya, les enseignements du Temple par le Maître Hilarion, les enseignements d’Héléna Blavatsky et d’Alice Bailey par le Maître Djwhal Khul.
L’union entre religion et science est aussi un point clé de la fusion Orient – Occident. La science se trouve maintenant au seuil du monde métaphysique. Les oppositions apparentes ne sont que les facettes d’une seule vérité. Ensemble elles peuvent permettre la démonstration scientifique de la réalité spirituelle de l’être humain, ce qui instaurera les conditions de la fraternité mondiale et des justes relations sur la planète.
« Il existe actuellement sur le plan intérieur, un projet tendant à fondre les manières différentes qu’ont l’Occident et l’Orient d’approcher la sagesse antique et la Hiérarchie. Pour réaliser parfaitement cette intention, la coopération et l’échange réciproque de sagesse et de connaissance sont essentiels. »
Alice A. Bailey, L’état de disciple dans le Nouvel Âge, vol. 1, § 19